Comment s'est développé le FiBL France au cours des dix dernières années?
Florence Arsonneau: Notre genèse et notre histoire sont intimement liées à notre territoire, la Vallée de la Drôme. La création de la Biovallée, ce projet unique en France visant à faire de la région un éco territoire de référence en matière de préservation des ressources naturelles, d'autonomie énergétique, de mobilité, de pratiques agricoles et d'habitudes alimentaires, a été pour le FiBL France un véritable tremplin. En effet, grâce à la volonté politique de disposer des compétences scientifiques à l'échelle d'un territoire, le FiBL France est devenu un acteur incontournable de la Vallée de la Drôme, et indispensable à sa dynamique pour l'agriculture biologique. En outre, ce lien spécifique au territoire nous confère une relation particulièrement forte à la pratique, aux agriculteurs et agricultrices, qui est d'ailleurs l'ADN du FiBL. En outre, en dix ans, nous avons drastiquement élargi nos activités: après avoir débuté nos recherches autour d'un groupe d'éleveurs caprins innovants, nous avons désormais développé une expertise dans les sciences du sol, la production animale, les plantes aromatiques et médicinales, et l'agroforesterie. De surcroît, notre rayon d'action s'étend dorénavant dans tout le quart sud-est de la France.
Justement, comment se positionne le FiBL France par rapport à la définition de la nouvelle stratégie défendue par le groupe FiBL?
Nous sommes dans sa droite ligne. En effet, nous défendons une approche "système" ainsi qu'une pluridisciplinarité. Nos compétences sont avant tout scientifiques: nous avons vocation à chercher, publier et faire de la diffusion technique. Notre volonté est de rendre le savoir accessible, en contextualisant perpétuellement notre recherche. Pas question de se cantonner à créer des connaissances sans les mettre en lien avec les besoins de la pratique! On possède également dans notre culture d'équipe une forte capacité à l'innovation. Preuve en est, nous participons à mettre sur pied un des premier "living lab" sur la santé des sols à l'échelle de l'Union européenne. Enfin, n'oublions pas un pan essentiel de notre mission, que nous souhaitons d'ailleurs renforcer à l'avenir: l'accompagnement des filières, de mettre en réseau les acteurs - semenciers, fournisseurs de machines, techniciens , etc.
Comment la collaboration avec d'autres entités du FiBL s'intègre-t-elle à vos activités?
Elle est essentielle et inhérente à notre positionnement géographique: nos activités de recherche couvrent le quart sud-est de la France et donc la vallée du Rhône, fleuve qui prend sa source en Suisse. C'est un symbole fort qui nous lie! Le département Suisse romande du FiBL et nous sommes ainsi fortement liés - nous sommes deux équipes de taille équivalente, nous avons deux histoires comparables et surtout nous avons tous deux un rôle très fort dans nos territoires respectifs.
Baisse de la consommation bio, enchaînement de politiques publiques ambivalentes voire contradictoires: comment le FiBL France trace-t-il sa route dans ce contexte national peu favorable?
Effectivement, en tant que chercheurs en France, nous sommes face à une réalité crue: les crédits actuels dédiés à la recherche sont certes maintenus, mais nous sommes de plus en plus nombreux à les solliciter. On se doit donc de fait travailler en étroite collaboration avec tous les acteurs du bio en France, que ce soient les groupements de producteurs, les instituts techniques ou les fédérations nationales et régionales et se serrer les coudes. Néanmoins, force est de constater que le FiBL France demeure un des acteurs qui compte dans le monde de la recherche appliquée pour l'agriculture biologique. Nos recherches on farm et notre pluridisciplinarité nous différencient clairement des instituts techniques qui ont une approche fondamentale, certes plus pointue, mais plus éloignée de la pratique. Et notre approche scientifique, protocolée, nous permet de faire davantage que de l'accompagnement d'itinéraires techniques.
Comment la composante climatique influe-t-elle sur les travaux du FiBL France?
Elle rythme notre quotidien et sous-tend tous nos projets de recherche: comment pallier au manque de fourrage pour les troupeaux ovins, bovins ou caprins, comment concilier la production fruitière et manque d'eau, comment rendre les sols plus résilients durant les sécheresses, etc. Force est de constater qu'ici, dans la Drôme, nous sommes aux prises avec les problématiques qui attendent la Suisse dans un futur proche. Par ailleurs, que ce soit en termes géographique ou climatique, nous sommes également la porte d'entrée vers le bassin méditerranéen, lui-même confronté à la lutte contre la désertification. Maroc, Tunisie, Turquie, etc.: le FiBL France travaille en étroite collaboration avec ces pays via des projets de recherche. Nous sommes dans une continuité climatique, car ce à quoi le nord de l'Afrique est confronté aujourd'hui nous attend, en Europe, demain.
Propos recueillis par Claire Berbain, FiBL
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