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Rio+20: De manifestation parallèle en manifestation parallèle

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Les représentants des ONG (organisations non gouvernementales) se retrouvent le plus souvent entre eux. On se rend visite les uns aux autres pendant les manifestations qui se déroulent loin de la «grosse artillerie». On est la plupart du temps fondamentalement du même avis, et pourtant chaque groupement aimerait voir ses propres revendications figurer dans le texte de négociation. La solidarité s’arrête avec ces spécificités puisque chacun trouve que son thème est plus important que ceux des autres.

La bombe a explosé le samedi matin lors du briefing des organisations agricoles, parmi lesquelles l’IFOAM est maintenant solidement implantée. Le Brésil a retiré l’ensemble du texte de négociation et veut tout reprendre depuis le début. Les trop nombreuses petites et très petites revendications, qui alourdissaient le texte avec d’innombrables parenthèses, ont bloqué les négociations. Sans compter que le texte allait trop loin sur certains points pour le Brésil.

Le nouveau texte a été communiqué par courriel le dimanche matin. Il avait été légèrement épuré et allait même moins loin sur certains points importants que ce qui avait déjà été convenu. Le dimanche soir, une centaine de jeunes représentants de diverses ONG ont élu le Brésil «Fossile de l’année».

Le texte de négociation contient néanmoins encore certains principes importants pour une orientation agroécologique de l’agriculture et de la production agroalimentaire. La crainte que trop de choses restent non contraignantes et que les différentes actions s’avèrent contradictoires au point d’être paralysées reste naturellement bien présente. Il est vraiment effrayant de constater à quel point peu de choses ont été faites depuis le premier sommet de Rio – bien que des décisions extrêmement importantes aient été prises alors.

Concernant l’agriculture et l’alimentation, les principes suivants sont actuellement définis:

  • La consommation durable est fortement prioritaire et des changements radicaux sont exigés (article 226).
  • L’agriculture et les populations rurales revêtent une importance capitale pour la lutte contre la pauvreté (article 109). L’accès des communautés villageoises aux crédits, aux prestations financières, aux marchés, à la propriété foncière, aux services de santé et aux prestations sociales, à l’éducation et à la vulgarisation, aux connaissances et aux techniques adaptées et abordables doit impérativement être garanti de toute ur-gence. Les petits paysans, les femmes et les groupes ethniques indigènes sont particulièrement mis en évidence ici. Les techniques agricoles traditionnelles et les semences locales traditionnelles sont aussi particulièrement mises en évidence.
  • Le texte souligne qu’il faut s’attaquer en toute première priorité à la pauvreté et à l’impossibilité d'accéder à suffisamment de nourriture (article 108). L’approche purement productiviste (les rendements avant tout) ne semble pas être autant au premier plan.
  • La lutte contre l’érosion des sols et l’augmentation de la désertification est forte-ment prioritaire. Les sécheresses périodiques sont considérées comme la cause prin-cipale des famines. L’amélioration de la gestion de l’eau et de la fertilité des sols sont des mesures capitales. Programmes d’éducation, projets de recherches et initiatives locales portées par des agriculteurs et des experts doivent aussi être encouragés (articles 207 à 211).
  • La dramatique régression de la biodiversité doit être stoppée (articles 198 à 206). La valeur unique et indépendante des intérêts économiques de la biodiversité est de nouveau soulignée, et le texte attire l’attention sur la valeur écologiques, génétique, sociale, économique, scientifique, éducative, culturelle, reposante et esthétique de la biodiversité. Le fait que les groupes ethniques indigènes et les communautés locales soient particulièrement dépendants des prestations fournies par des écosystèmes in-tacts est lui aussi expressément souligné. Leur accès à ces prestations et leur utilisa-tion commune sont donc très importants pour la lutte contre la pauvreté et le développement durable. L’utilisation et la commercialisation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles qui y sont reliées sont très importantes surtout pour les pays en voie de développement, qui sont très souvent les pays d’origine des ressources génétiques, et elles doivent tenir compte d’une répartition équitable et juste des avantages économiques qui en découlent.
  • La pollution de l’environnement avec des produits chimiques et des déchets doit diminuer drastiquement. On attribue une grande importance au développement d'alternatives aux produits chimiques, qui doivent par ailleurs devenir inoffensifs. Leur développement doit tenir compte de l’ensemble de leur cycle de vie jusqu’à leur recyclage ou leur élimination totale. C’est avant tout important dans l’agriculture puisque les produits chimiques y sont utilisés à très large échelle. On attribue une grande valeur à la diminution et au recyclage des déchets. Bien que le principe moderne du «cradle to cradle» («du berceau au berceau») ne soit pas spécifiquement mentionné, les propositions vont dans cette direction: les déchets engendrés par chaque processus de fabrication et chaque consommation doivent être d’assez grande valeur pour pouvoir servir de matière première pour un autre processus (articles 215 à 225).
  • Le changement climatique est un des grands défis de notre temps. De nombreux pays en voie de développement sont déjà frappés par des sécheresses et des phénomènes météorologiques extrêmes. Même cumulés, les objectifs actuels de tous les pays pour la diminution des émissions de gaz à effet de serre ne suffiront jamais à maintenir le réchauffement général à 1,5 ou 2 degrés Celsius endessus du niveau préindustriel. Les mesures d’adaptation au changement climatique vont donc forcément devenir toujours plus urgentes (articles 191 à 193).

Malgré toutes ces désillusions, le fait qu’une bonne pratique de l'agriculture biologique soit capable d’apporter des progrès sur le plan de nombreux défis reste pour moi d’une importance capitale. De même que le fait que le FiBL et ses projets de recherches soient exactement dans la ligne des stratégies de Rio+20.

Urs Niggli, 20.6.2012, 13:34

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